
Luto/a
Les Désobéissances


















'Nature is a feminist issue', Performance
Amsterdam, Juillet 2023





















Luto/a
Les Désobéissances
Elsa Leydier vit au Brésil près de la Mata Atlântica; une forêt qui court le long de la côte brésilienne sur plusieurs milliers de kilomètres, indissociable de l’Océan Atlantique dans lequel elle se jette.
C’est une forêt qui disparaît à toute allure, et dans l’indifférence la plus totale — comparé à l’émoi que l’Amazonie suscite.
Il ne reste aujourd'hui que 8% de la surface de Mata Atlântica qui couvrait le Brésil lors de l’invasion par les Portugais.
Un grand nombre de projets motivés par le capitalisme justifient sa destruction.
L’un d’entre eux touche particulièrement l'artiste, proche de son lieu de vie. Il s’agit de Porto Sul, un projet de construction d’un port industriel dont les travaux sont en cours, détruisant des hectares de forêt et de fonds sous-marins (sur la route migratoire des baleines), portant atteinte à des milliers d’emplois et vies de pêcheuses et pêcheurs de la région, paysan.ne.s des Mouvement des Sans Terre, communautés quilombolas et autres habitant.e.s de la région.
"Luto", en portugais, c’est le deuil. Le deuil que l’on porte pour la forêt, son grouillement de vie et sa biodiversité folle et créatrice qui s’éteignent peu à peu sous le son sourd des projets capitalistes en marche.
Ici, des pages des arrêtés et autorisations de destruction de la forêt ayant permis le développement du projet Porto Sul sont apposées sur des photographies de la Mata Atlântica et de l'océan. Les très ordinaires feuilles A4 imprimées apparaissent alors comme des anomalies, qui auraient envahi un environnement luxuriant où elles n'ont pas leur place, qu'elles viennent cacher, détruire, annuler.
Comme un écho aux collages de rue féministes nés ces dernières années qui essaiment à travers le monde, des lettres tracées à la peinture noire viennent ici changer "luto" en "luta". "Luta", c’est la lutte. Si une simple feuille A4 peut être ce qui permet la destruction d’une forêt et d’écosystèmes entiers, elle peut aussi être le support pour d’autres luttes, celles qui vont dans le sens de la justice sociale et climatique, qui vont, elles, sauver des vies et des forêts.
Elsa Leydier a souhaité rappeler ici que de toute blessure peut naître la résistance. Elle inviter à suivre l'élan de celles et ceux qui s'emparent des outils qui sont entre leurs mains — qu'il s'agisse des outils du Maître, qu'il faut alors subvertir, ou encore des moyens parfois triviaux dont elles et ils disposent déjà — pour lutter.
En transmutant le sens du mot qu’il recouvre, le A vient ici s’ériger en élan à puiser la force de lutter et s’élever contre les injustices, depuis le cœur même de la blessure. Tout "luto" a en lui un potentiel de "luta".
Les images du travail sont imprimés sur un papier écologique fait à base de chanvre européen. Les cadres sont fabriqués en Chine. A travers ces choix de production, Elsa Leydier a souhaité mettre l'accent sur l'idée que, même en agissant avec les meilleures intentions, nous sommes toutes et tous dépendant.e.s (dans le contexte de nos modes de vie actuels) d'un système qui puise ses matières premières en Amérique latine et exploite une main d'œuvre bon marché en Asie.
LUTO/A appelle, comme le fait l'écoféminisme à remettre en question et déconstruire notre système capitaliste actuel dans sa totalité — plutôt que d'agir sur de petites actions isolées qui ne font que le rafistoler, comme le feraient quelques bouts de scotch sur une structure entière en train de s'effondrer.
impressions jet d'encre, impressions offset, cadres en bois teinté or fabriqués en Chine, collages féministes de rue
Formats divers
Leydier