TOGO EXOTIQUE est une réflexion sur les biais coloniaux de la photographie, qui perpétuent aujourd’hui encore les rapport de domination entre l’artiste (actif et créateur) et sa muse (passive et représentée). La presque intégralité des productions visuelles contemporaines place ainsi toujours les mêmes personnes (privilégiées et/ou blanches et/ou masculines et/ou du «Nord global»), en position de représenter les mêmes personnes (précaires et/ou racisées et/ou sexisées et/ou du «Sud global»). 

Suite à une commande passée à Elsa Leydier, puis finalement annulée, pour laquelle elle devait voyager en Afrique de l’Ouest pour y photographier une ONG gérée par des femmes, l’artiste propose dans TOGO EXOTIQUE une réflexion sur l’impossibilité — formelle comme éthique — de créer une image juste d’un territoire et de ses habitant.e.s, alors que des rapports coloniaux sous-tendent les histoires des pays d’origine de la photographe et celui des personnes photographiées. 

L’artiste a choisi ici de travailler avec des pellicules argentiques 35mm couleur — matériau photographique aujourd’hui daté, à l’ère du numérique et du 3.0. La photographie argentique couleur ayant été la technique ayant permis l’essor de la photographie amateur, au même moment que les voyages touristiques à l’étranger se démocratisaient, elle a par conséquent grandement contribué à banaliser la production d'images et de représentations de peuples et territoires du Sud global faites par des personnes du Nord global.

En plongeant des pellicules argentiques non exposées dans une «film soup» composée d’ingrédients trouvés dans une boutique parisienne vendant des produits importés d’Afrique de l’Ouest, Elsa Leydier réalise des images abstraites et oniriques. A travers ces propositions visuelles, l’artiste souhaite souligner l’impossibilité de se départir des filtres exotisants qui marquent son regard.